MSM #012

 

—Chers auditeurs, aujourd’hui nous débutons une série d’émissions spéciales durant lesquelles, je l’espère, nous pourrons lever le voile sur certains mystères du Système Solaire. Comme vous pouvez le constater, nous glissons actuellement au-dessus de Mars à bord de ce bon vieux Witch. Croyez-le ou pas, certains d’entre vous ont encore un cerveau, et du coup ils s’interrogent : comment un parfait inconnu a-t-il pu se procurer un vaisseau spatial militaire américain qui n’est -soyons réalistes- même pas sensé exister ? Et bien pour répondre à votre question…

(gobe une chips et prend soin de mâcher bruyamment dans le micro pendant une bonne quinzaine de secondes)

—…et voilà toute l’histoire. J’espère que cela calmera un temps votre -légitime- curiosité.

(Rangiroa s’éveille dans son siège anti-accélération)

Rangi : (s’étirant) Mmmmmmmmh… Ouh, ça craque ! (se masse l’épaule) On est arrivé ?
—Presque, madame la Comtesse. Je profitais de votre sieste pour musarder à haute altitude, tout en remontant lentement vers le terminateur martien. (tend une main ouverte) Droit devant !
Rangi : Je… … C’est… magnifique !
—Oui, ça assure bien niveau pixels ! Il y a le coucher de soleil sur Mooréa vu depuis Tahiti. Et puis l’aube martienne depuis l’orbite basse. C’est assez indescriptible, mais équivalent sur l’échelle du Sublime.
Rangi : Je n’ai même pas la force de faire une remarque sarcastique !
(rire) C’est dire !
Rangi : Du coup, nous sommes tous proches de Bootstrap !
—Alors la longitude correspond bien… Mais niveau latitude, c’est mort : nous survolons l’hémisphère Sud, Sirenum Terra pour être précis ! Et les copains d’Elon Musk, eux, vivent sur Amazonis Planitia, hémisphère Nord, et bien plus près de l’équateur. N’oublie pas qu’ils sont encore esclaves de l’équation de Tsiolkovski. Budget carburant tendu comme un string, fenêtres de tir tous les 26 mois, latitudes d’atterrissage limitées, transferts de Hohmann, et toutes ces conneries assommantes dont le Witch se contrefout ! (rire bref) Quand j’y pense, c’est vraiment la Marine à Voile, leur grand projet.
Rangi : Les pauvres. Il faudra leur expliquer comment faire, un jour.
(rire désabusé) Ouais ! Si on veut devenir les deux individus les plus recherchés de tout le Système, c’est une idée, je suppose…
Rangi : (petite voix) Tout compte fait je vais attendre encore un peu…
‘Le docteur Zen vient de quitter le chat !’
Rangi : Non, mais sans déconner, je me suis endormie en orbite lunaire. Pourquoi je me réveille sur Mars ?
—Hé bien comme j’allais l’expliquer aux auditeurs, j’ai décidé de mener un test du pod imageur que j’ai emprunté à tu-sais-qui.
Rangi : Ah. Oui. Le machin fusiforme hérissé de caméras bizarres. Et le manuel que tu m’as obligée à lire de bout en bout, espèce de monstre !
—J’avais besoin d’une spécialiste. De quelqu’un qui puisse se coltiner 1000 pages de documentation très vite, et surtout sans se lasser !
Rangi : Alors pour la vitesse, je confirme. Par contre, niveau lassitude, ouh, j’en ai une bien bonne à t’annoncer…
(s’esclaffe) J’aurais dû m’en douter. (lui jette un regard en coin) Toujours ta fameuse « personnalité » qui interfère…
Rangi : Objectivement, la doc, c’est jamais passionnant ! Avec ou sans personnalité. RTFM, que diable !
—Je souffre avec toi, ma douce. Bref, pour éviter toute activité suspecte dans l’espace cislunaire, j’ai décidé de mener nos séances d’entrainement…
Rangi : …nos missions d’espionnage…
—…sur la Planète Rouge. Premièrement, on n’y trouve que des Muskiens, et ces mecs ne peuvent pas blairer le Consortium.
Rangi : On les comprend.
—Voilà. Ensuite, il y a deux terrains que j’aimerais bien scanner. Notamment une série de failles au Sud de Méthalox City.
Rangi : Toi et ta passion des vieilles pierres !
(roublard) On ne sait jamais… Des ressources enterrées. Des milliardaires aux mains encombrées de billets qui ne savent pas où creuser. Des… heu… des « radio-pirates » avec une carte du sous-sol martien précise, datée et légendée.
Rangi : (sourire élargi) Ça semble lucratif, ton histoire. Tu as une estimation chiffrée ?
—Of course, ma délicieuse calculatrice à effet Casimir différentiel. Mais pas maintenant. Pas ici. Pas en direct, voyons !
Rangi : (vraiment déçue) Ah, zut.

 

 

—Hé non, pour le moment, c’est l’heure de la friandise musicale du jour ! Je vous entends remuer d’ici, mes braves babouins narcoleptiques en costume de Capitaine Flemme ! Mes indomptables révoltés du chocolat Bounty de 17h ! Mes pirates de l’Espace-Détente à pointeurs-laser ! Je ne vous ai pas oubliés. Le morceau du jour s’appelle Heroes vs. Villains, il a été composé par heu… Strayboom (WTF ?!) enfin, bref : Strayboom ou « Vincenzo » pour les vieux de la Vieille ( 🙂 ) et il accompagne l’invitation pour The Ultimate Meeting, une demoparty de 2011. J’adore les invitations de demomakers, la plupart du temps, leur musicien part dans un registre joyeux et optimiste, c’est très rafraichissant.
Rangi : (sûre d’elle) Je ne peux qu’approuver.
(légèrement pris de court) … Heu… Ah bon ?!
Rangi : Ooh yeah. (^_^)
(facepalm immédiat) Malédiction ! Encore grillé !
Rangi : Et sur la ligne d’arrivée ! Chanmé !

 

Note Technique : Un grand, un énooooorme merci à nimitz, le codeur du splendide shader « Sirenian Dawn » illustrant cet épisode, et à la plateforme Shadertoy. Sans eux -ainsi que Skaven252 et Vincenzo- ce billet n’aurait pas la même saveur.

MSM #011

Prévioussement, dans MSM : L’animateur et la fringuante Rangiroa s’accordent quelques jours de repos sur Terre. Après avoir profité de la tranquillité de Motu Lambda, ils visitent Papeete et le campus du Tahitech. Mais la journée avance, et l’autonomie de Rangi n’est pas illimitée…

 

 

Rangi : (boit une gorgée bien fraîche directement au goulot de son thermos et soupire d’aise) Je vide ma réserve d’eau distillée à toute vitesse, avec cette chaleur…
—Oui, j’ai remarqué. Tu as le front couvert de sueur, et les cheveux complètement trempés.
Rangi : Refroidissement d’urgence par hypersudation.
—Sans déconner, déjà ?!
Rangi : Mouaip… (hoche la tête) Et encore, j’ai coupé pas mal de processus cognitifs inutiles pour diminuer la charge.
—Ta bulle cérébrale est peut-être un chef-d’oeuvre d’intégration, mais niveau thermodynamique, c’est pas encore tout à fait ça…
Rangi : Heu, c’est toi qui l’a installée, hein ?! Je rappelle qu’à la base, mon corps devait recevoir un cerveau beaucoup plus simple.
(ton désolé) Certes. L’improvisation. Les limites du « hacking ». Le budget refroidissement était effectivement un brin serré…
Rangi : … Mais je ne suis clairement pas équipée pour vivre dans un climat tropical. C’est vrai aussi.
(après un temps de réflexion, sourire dans la voix) Pourtant le bikini t’allait rudement bien, ce matin.
Rangi : Oui, alors tu dis ça… Mais quand il faudra nettoyer tout le sable, l’eau salée, et probablement aussi quelques petits poissons et crustacés, ce sera pas le même refrain.
—On a assez d’eau distillée à bord du Witch pour confectionner une douche. Je te bricolerai ça tout à l’heure. Je détesterais qu’un caillou abîme ta belle mécanique.
Rangi : D’après toi, les cailloux ricochant sur mon casque il y a trois semaines, à Reiner Gamma, ils étaient moins dangereux ?
(ignorant la dernière remarque)… Mais, attends un peu ?! Des crustacés ?! Des poissons ?! Je croyais que tu étais étanche ! Tu faisais quoi, exactement, sur la plage, à part nager ?
Rangi : (souriante) J’ai… bu de l’eau de mer.
(comme si cela clarifiait tout) Bien sûr. Pour goûter, je suppose. … Ah Rangi, ma petite murène galactique à propulsion magnéto-plasmique ! Tu pouvais pas recracher, non ?
Rangi : Nan, t’as pas compris, je reformule : j’ai plongé, et par accident j’ai avalé de l’eau de mer.
(riant) T’as bu la tasse, quoi.
Rangi : (interloquée) Non, juste comme ça. Sans tasse. (encore plus étonnée) Pourquoi j’aurais pris une tasse ?
—C’est… une expression ? (suspicieux) Tu ne connaissais pas ?
Rangi : (vexée, évasive) Non. Si… Enfin, peut-être. Je sais plus. Fais pas attention, j’ai sûrement coupé un ou deux circuits de trop… Du coup niveau sémantique je ne fonctionne qu’à 20%.
(très sérieux) … Hé, tu vas pas te mettre à bugger là comme ça au milieu de la rue piétonne ?!
Rangi : Nan, ça va, t’inquiète… (riant à sa propre blague) Et de toute façon, dans le pire des cas, j’essaierai de tomber directement dans une poubelle. Le recyclage, les déchets électroniques, tout ça. C’est la moindre des choses, quand même.
(ne rit pas du tout) Hahaha très drôle.
Rangi : Rohloloooo. Si même toi tu n’as plus le sens de l’humour… Mais t’as raison. Au cas où, mon bouton RESET est situé juste au niveau de m…
(hurlant, mains sur les oreilles) LALALAAAAAAAA JE N’ENTENDS RIEN !

(Un peu plus tard, nos deux touristes sont retournés à la boulangerie du midi pour acheter une bouteille d’eau glacée. Que Rangi vide presque d’un trait…)

Rangi : (repose la bouteille) Haaaa, ça va nettement mieux… Noyau cognitif de retour à 100% !
—Ça fait quoi, d’avoir perpétuellement le cerveau au bord de l’ébullition ?
Rangi : Je sais pas trop. Ça fait quoi, d’avoir un cerveau qui ressemble à une gelée tiédasse ?
—Ouh, la répartie ! T’échauffe pas toute seule, va. J’ai plus l’énergie. Et mon dos est en compote ! Foutue gravité ! Enfin… Regarde ce coucher de soleil, sérieux… Si c’est pas merveilleux !
Rangi : (un long moment après) N’empêche. Aucun rapport, mais j’adore comment elle parle, ma copine boulangère !
—C’est l’accent tahitien, Rangi. Tu l’as oublié, ça aussi ?
Rangi : (soupir) Encore un truc charmant qui n’a pas franchi la conversion… Comme l’histoire de tasse, là, tout à l’heure.
—Ah. Donc ce n’était pas dû à ton fonctionnement bridé ?!
Rangi : Non. Là je suis à fond, et toujours aucune trace de cette foutue expression.
—Alors en effet, c’est curieux. Je n’imaginais pas que la transition d’architecture serait destructrice à ce point pour les détails.
Rangi : Et tu as remarqué ? Seulement ceux qui datent déjà un peu… Comme notre vie sur Terre, avant. Quand je n’étais que code pur.
—Bien vu. Il faudra effectuer des tests quand on sera revenu chez nous… J’ai les sauvegardes, on va vite te remettre d’applomb. (attentif) Pour l’instant, ça ne te dérange pas trop ?
Rangi : Mmmmh ? Quoi ? Oh non. Je me sens bien, fonctionnelle, pas de souci à ce sujet. Au début, je croyais que manquer d’informations serait un problème, mais maintenant que je suis disons, plus « bio-mimétique » dans ma façon de penser, je dois dire que… Hé bien je me sens plus intéressée par mes opinions sur les choses que je connais, que par toutes les choses que j’ignore.
—Haha, chers auditeurs, comptez sur une IA pour résumer en une phrase la vie de milliards d’êtres humains !
Rangi : (étonnée) Mais… L’émission n’est pas commencée, à qui tu parles !?
—L’habitude, ma chère, l’habitude. Car je vais glisser ta remarque dans le prochain numéro, tu peux en être certaine. C’était trop égocentrique de ta part, trop parfaitement individualiste. C’était tellement humain, en fait, que tu flirtais avec l’Universel ! 😀 (il fait un signe « chut » et active le micro) Chers auditeurs, vous tous qui nous écoutez, mes chers babouins de l’espace, j’en profite pour lancer le morceau du jour. Il s’intitule « Tonight, tonight », a été composé par Wayfinder, et a servi de bande-son à « The Popular Demo », une démo du groupe allemand Farbrausch, qu’on ne présente plus parce que Farbrausch, quoi, need I say more ? Alors souriez, profitez de la soirée, et si vous vous sentez d’humeur… Rejoignez le dancefloor !
Rangi : OOH YEAH !

 

MSM #010

 

Prévioussement, dans MSM :
L’animateur et Rangiroa prennent quelques jours de repos bien mérités sur un motu isolé, quelque part au nord-est de Tahiti. Il s’agit de permettre à Rangi de « trouver ses marques », étant donné qu’elle n’a jamais vraiment marché physiquement à la surface d’un monde à forte gravité, et aussi de lui procurer un environnement plus stimulant que les couloirs d’une colonie lunaire. L’animateur ne s’en est pas vanté, mais lui aussi, il doit retrouver ses jambes terrestres, car la pesanteur lunaire ne lui fait aucun bien ! Finalement, nos radio-pirates préférés ayant retrouvé un certain tonus, ils descendent vers Papeete, visitant au passage le campus le plus prodigieux de tout l’univers : le Tahitech et ses îles artificielles.

 

—Chers auditeurs, nous voici donc à Papeete en situation réelle, et comme je le craignais, Rangi a la tête qui tourne.
Rangi : (riant) Roooh, il faut toujours que tu exagères. Mon processeur central est extrêmement stable.
—… … Mais… Tu n’as même pas de processeur central ! Ton système est une bulle FPGA de dernière génération, pas une CPU classique. Et j’ajoute que ce genre de truc coute la peau du cul. « Des millions d’euros », en français !
Rangi : Désolée, j’écoutais pas. Tu dis que je suis une poule de luxe, c’est ça ?
—Nan, plutôt l’heureuse propriétaire d’un matériel volé hors-de-prix. Et je ne parle même pas de ton corps cybernétique : celui-là, boudiou, même au marché noir, j’ai eu du mal à récupérer les spécifs. Maudit Consortium !
Rangi : (rigole de bon coeur) Mais nous sommes des pirates de l’espace, mon cher. Nous devons mener grand train ! Ceinturons à escarboucles. Pistolets incrustés d’or, d’orichalque et de platine. Sabres à antimatière, Mille Tonnerres ! … Des cerveaux programmables à plusieurs millions, pffffff ! Ça va pas nous faire reculer, ce genre de broutilles.
—Oui, heu, tu sais, entre ça et la « récupération » du Witch, ma tête doit probablement être mise à prix sur plusieurs planètes dans le Système Solaire.
Rangi : Tu as toujours rêvé de prononcer ces mots, hein, avoue !
—Tu me connais si bien. 😀
Rangi : (percute soudain) Aaaah, mais c’est pour ça, en fait, que tu t’es laissé pousser la moustache. Les caméras du Tahitech, tout ça.
(déçu) Mais… Non, pourquoi ? … Je croyais simplement que tu aimais !
Rangi : (rire contenu) Heu… non.
(déception sensible) Ah.
Rangi : (taquine) Pourquoi, ça a de l’importance ?
(oui oui) Non non.
Rangi : (change de sujet) Tiens t’as vu, ils ont toujours le laser rouge sur la Tour d’Exale. Ça au moins, ça n’a pas changé.
—Oui, héhé, heu, Rangi, ma petite souris thermo-optique à calibrage métachrone, tu te souviens de ce que je disais l’autre jour à propos de la discrétion, la menace du Consortium, tout ça ?
Rangi : Tu dramatises. Tout ce que nos auditeurs savent, c’est que nous sommes déjà venus ici avant. Pas le nombre de fois, ni les circonstances. Comment veux-tu que cela ait la moindre signification ?!
(riant) Ma chère, tu serais surprise de la finesse des sbires du Consortium. Il y a des gens qui ont disparu pour moins que ça…
Rangi : … pour finir sous le bistouri du Professeur Zen, si on en croit les rumeurs.
—Tu ne soupçonnes pas le dixième de ses méfaits. Ou ceux du Consortium Lunaire.
Rangi : Ah ! Révélations fracassantes du fameux « prisonnier libéré » ?
—Par exemple, oui. Il m’a confirmé des choses que j’avais déjà inférées de mon côté. Et suggéré d’autres. Que j’ai depuis vérifiées.
Rangi : Curieuse je suis.
(aspirant l’air entre ses dents d’un air douloureux) Tu ne devrais pas, ma douce waifu orange-caramélisée au lait concentré sucré. Ce sont là des choses sinistres, et pesantes. Une conversation pour un autre jour. Peut-être même une émission spéciale.
Rangi : (avec un ton chaleureux) C’est vrai que ce serait dommage de gâcher notre escapade tahitienne…
—…et ta confiance en l’humanité.
Rangi : Hein ?!
—Non rien, rien. Dis donc, j’ai très faim, je me prendrais bien un truc à grignoter en marchant.
Rangi : D’accord, mais prévois une portion pour que je puisse savourer ! Et c’est moi qui donne les billets ! … ET, ET, ET, qui passe la commande ! La boulangère a l’air sympa, je veux lui causer.
(dubitatif)
Rangi : (défiante) Quoi, j’ai bien le droit de me faire UNE copine terrienne en vacances, non ?
(se rend à l’évidence, mains ouvertes) Complètement, complètement. … Juste un détail avant.
Rangi : (agacée) Quoi, encore !? Faut que tu passes un coup de fil au Président de la Polynésie ?
(ennuyé) Non, écoute, heu, c’est pas ça mais… Ne lui dis pas que tu t’appelles Rangiroa.
Rangi : Ha bon !? De mieux en mieux ! Et on peut savoir pourquoi ?!
—Parce qu’elle trouverait ça bizarre. Dans la mythologie polynésienne, Ranginui, Rangi, ou même Rangiroa c’est pas une déesse, mais… un dieu. (rire désolé) Le Dieu du Ciel, plus exactement, mais une entité masculine, quoi.
Rangi : (effarée) KEU-WA ?! Mais… (ton soudain plaintif qui grimpe dans les aigus) Mais je croyais que c’était une île somptueuse des Tuamotu !
(coupant le micro de la radio, et parlant très vite) Ouiiiiii, bon, heu, oui. C’est bien pour ça que je t’ai donné ce nom : tu étais sublime dans ton sarcophage du Consortium, avec ta peau nacrée, tes yeux bleus grands ouverts et tes longs cheveux blonds, alors je t’ai donné le nom de la plus belle chose bleue et blanche et dorée que j’ai jamais vue. L’atoll de Rangiroa. Voilà, ça s’est imposé à moi comme ça, en un éclair, une histoire de choc visuel, de couleur, de longueur d’ondes, même, bref ça tombait sous le sens.
Rangi : (bouche ouverte, sourcils en orbite, assimilant les dernières phrases)
(très très embarrassé) Et puis si ça peut te consoler, « Dieu du Ciel », c’est très exactement ce que j’ai dit lorsque je t’ai vue pour la première fois…
Rangi :
—Donc ton nom, en vérité, tu le mérites DEUX FOIS !
Rangi : (complètement attendrie, d’une toute petite voix) C’est la chose la plus belle -et aussi la plus idiote- que tu m’aies jamais racontée !
—Oui, bah, je regrette rien. J’aurais dû consulter la mythologie avant de te baptiser, mais d’un autre côté, « Rangiroa », c’est magnifique. Musicalement, éthymologiquement. En tant qu’île, en tant que dieu, et en tant que gynoïde la plus avancée de tout le monde moderne. (voyant que Rangi déborde de fierté à cause de la dernière phrase) Oui, bon, hein, ça va les chevilles ? Tu sais très bien ce que j’ai voulu dire ! Crâneuse !
Rangi : (secouant la tête, encore sous le choc, incrédule) Hé bah toi alors, tu sais parler aux femmes artificielles !
—Voilà. Maintenant, si tu permets, je vais rebrancher le micro et m’excuser de la coupure auprès de nos aimables auditeurs.
Rangi : (sur un nuage, comme anesthésiée) Et moi je… passe commande… (marmonnant pour elle même) … sans donner mon illustre prénom dont je suis désormais ENCORE PLUS FIÈRE !
(intonation pro) Désolé messieurs, il y a eu… heu… une perturbation temporaire du sub-espace qui a causé du souci à nos algorithmes de suivi, mais le pire est passé ! Sans transition, je lance donc le morceau du jour : il s’intitule « Etch-A-Sketch » (« télécran » en français) et c’est -encore- un moment de sourire plein de virtuosité, et la bande sonore de la démo du même nom par le groupe nordique « Candela ». Teetow, son compositeur, est un musicien accompli, on lui doit par exemple l’excellente musique de « Fair Play To The Queen », ainsi que bien d’autres réussites, dont celle que vous écoutez depuis le début de l’émission (et qui est une collaboration).
Je vous laisse donc apprécier, pendant que nous poursuivons notre tour sur le remblais du Tahitech.
Rangi : (de sa voix la plus enjouée) « Oooooh yeah ! »
—C’est tellement plus cool quand c’est moi qui le dit…
Rangi : (insolente) Ce n’est clairement pas l’avis du courrier des auditeurs !
(ricanant tranquillement) Dieu du ciel, ces babouins !