Le concept du jour est : « bougie à oxygène »…
Dans le film d’horreur LIFE, une équipe de chercheurs récupère un échantillon de vie martienne à bord d’une sonde en perdition. Bien sûr, ils décident de réanimer quelques cellules dans un compartiment sécurisé de l’ISS, et cet organisme se révèle être un monstre de la pire espèce. Fort comme un gorille, rapide, glissant et intelligent comme un poulpe.
S’en suit une longue traque Alienesque dans les coursives de la station, qui aboutit rapidement à la destruction de plusieurs appareils dont… le système de survie (air + température).
Et c’est là -spoiler !- que l’un des protagonistes sauve la situation en utilisant un truc étrange, ce qu’il appelle une « bougie à oxygène ». Dans le film, le design de cet outil est étonnamment cool : un genre de bâton futuriste (style sabre laser éteint) qu’on active à la main et qui, dès lors, dispense lumière, chaleur, et surtout un flux constant de gaz respirable…
Face à une telle trouvaille, je me suis posé la sempiternelle question : « Couillonnade hollywoodienne ou réalité ? » Mais porté par l’histoire, j’ai oublié de faire pause. Et ce n’est que plusieurs mois plus tard, alors que je m’intéressais aux techniques de production d’oxygène à bord de l’ISS, que je me suis dit : « Tiens au fait, tant que tu y es, pense à creuser la question des fameuses bougies à oxygène… » J’ai donc filé sur Wikipédia où tout est, évidemment, expliqué noir sur blanc. Je ne vais donc pas me substituer à cette excellente source. Lisez l’article tranquillement, c’est aussi bref que passionnant :
Générateur chimique d’oxygène…
Voilà. Les bougies à oxygène existent donc bien, elles sont présentes partout en tant que sources de secours (avions, sous-marins, capsules spatiales) sauf qu’elles n’émettent aucune lumière, qu’il s’agit de simples canettes de quelques kilos, et que leur version spatiale émet un « jour-homme » d’O2. (ça c’est du packaging intelligent)
Mais continuons un peu le raisonnement, voulez-vous ?
Vous aurez noté l’équation chimique donnée dans l’article précédent :
2NaClO3 -> 2NaCl + 3O2
…qui signifie qu’au cœur de ces fameuses bougies, par décomposition thermique (i.e. chauffage), pour deux molécules de perchlorate (NaClO3) on obtient deux molécules de sel de table (NaCl), et trois molécules de dioxygène (O2, le gaz respirable).
Pourquoi je détaille cela ? Mais… ?! Pour faire la connexion avec la rubrique du « Baudelaire Martien », bien sûr ! 😀
Car vous l’ignoriez peut-être, mais l’un des contre-arguments sérieux s’opposant à la présence humaine sur Mars, c’est la présence dans le terrain de quantités mesurables de perchlorates (0.5 à 1%). Ce composé est en effet toxique en faibles proportions. Du coup, chaque sortie extra-véhiculaire demandera des procédures avancées de décontamination pour éviter de ramener cette saloperie dans l’habitat.
Mais… Toute médaille a son revers.
Les perchlorates sont également une source intéressante d’oxygène, vous le savez désormais… De fait, après une courte recherche en ligne, des essais sont en cours pour créer des générateurs d’oxygène exploitant une saumure saturée en perchlorates. Et les résultats semblent prometteurs ! Cette stratégie serait d’ailleurs nettement plus productive que le procédé MOXIE testé récemment à bord du rover Perseverance (…technique qui consiste à décomposer le CO2 atmosphérique grâce à l’électricité -comme l’oxygènateur de Mark Watney dans « Seul Sur Mars »).
Et voici donc comment on passe des techniques d’alimentation de secours en oxygène à la conquête martienne : grâce aux perchlorates. J’aurais encore beauuuuuuucoup de choses à ajouter, des faits, des données chiffrées, des spéculations, des idées, tout ça, mais je vais m’arrêter là pour aujourd’hui. On est dans « Concepts », pas dans un épisode du « Baudelaire Martien ».
C’est tout pour aujourd’hui, soldat. Rompez ! 🙂